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Date : 12 mai 2025
Rédaction : Cédric Fontaine

POUR EN FINIR AVEC LES FAUSSES INFORMATIONS SUR LA RÉCUPÉRATION DES EAUX DE PLUIE.

Nous avons vu fleurir sur internet ces dernières semaines différentes publications de pseudo journalistes concernant la récupération des eaux de pluie et les risques législatifs liés à cette pratique. Je dis pseudo journalistes, car les informations communiquées sont souvent erronées, ressemblent étrangement aux réponses que vous obtenez lorsque vous faites appel à un logiciel d'(in) […]

Nous avons vu fleurir sur internet ces dernières semaines différentes publications de pseudo journalistes concernant la récupération des eaux de pluie et les risques législatifs liés à cette pratique. Je dis pseudo journalistes, car les informations communiquées sont souvent erronées, ressemblent étrangement aux réponses que vous obtenez lorsque vous faites appel à un logiciel d'(in) intelligence artificielle.

Dans le même temps, je reçois ce matin un SMS d’un stagiaire formé il y a quelques mois qui m’écrit : » J’ai un client qui a deux cuves de récupération d’eau de pluie et la mairie lui demande de payer des impôts sur le fait de rejeter la récupération des eaux dans les toilettes et la machine à laver dans les eaux usées ».

Entre la méconnaissance de la législation de la part de cette commune et la volonté de faire du buzz dune mauvaise presse, il me fallait réagir.


La récupération de l’eau de pluie : une pratique encadrée !

La valorisation de l’eau de pluie est encadrée par deux documents : le décret et l’arrêté du 12 juillet 2024 « relatifs aux conditions sanitaires d’utilisation d’eaux impropres à la consommation humaine pour des usages domestiques… ».
Il y a donc bien une législation en vigueur qui régit l’utilisation de cette ressource naturelle et gratuite. Il n’y a donc, dès lors que l’on respecte la loi, aucun risque juridique à valoriser l’eau de pluie contrairement à ce que laisse penser nos pseudo journalistes d’internet.

Ce blog n’a pas vocation à faire une analyse détaillée des textes en vigueur, mais je peux vous garantir qu’il est légal de collecter les eaux issues de nos toitures pour les utiliser, pour différents usages, en dehors des usages alimentaires et des usages liés à l’hygiène corporelle. Les usages évoqués dans le SMS qui j’ai reçu, à savoir l’alimentation des toilettes et du lave-linge, sont bien autorisés.

Mais qu’en est-il de cet impôt mentionné par la mairie ?

Pour bien comprendre ce qui se joue, il faut connaitre le principe de financement de l’eau potable et de son assainissement en France.
L’eau potable est fournie à l’ensemble des citoyens (sauf cas particulier de sites isolés) par une société privée (dont les plus connues sont Veolia, SAUR ou SUEZ) ou par une régie (c’est le cas de nombreuses grandes villes).

Pour ce service, vous payez un montant par mètre cube d’eau
consommé. Concernant l’assainissement des eaux usées, il existe deux cas de figure.

  • cas N°1 : Vous êtes en assainissement collectif. Vos eaux usées sont collectées et traitées par une société privée ou une régie.
  • cas N°2 : Vous êtes en Assainissement Non Collectif (A.N.C.). Vous épurez vous-même vos eaux grâce à une unité de traitement individuelle (fosse septique, micro station,.. _)

Dans le premier, vous payez une taxe d’assainissement pour financer le service que l’on vous offre. Le montant est proportionnel aux volumes d’eau consommée. Dans le second cas, vous ne payez rien, car vous avez vous-même investi dans un dispositif de traitement.


Eau de pluie et assainissement

Il faut savoir que pour des raisons de simplicité, chaque habitation est équipée d’un unique compteur (sauf cas de compteurs verts). L’achat d’eau potable et la taxe d’assainissement sont donc calculés sur la base des volumes comptabilisés par cet unique appareil.

Prenons le cas d’une famille qui consomme 100m³ / an. Cette famille est raccordée à l’assainissement collectif. Le prix de l’achat d’eau potable est de 2€/m³ et celui de l’assainissement est de 3€ /m³. Cette famille devra s’acquitter d’une facture de 100 × 2€ pour l’acheminement de l’eau potable et de 100 × 3€ pour le traitement de ses eaux usées. La facture unique possèdera deux lignes distinctes.

En cas de valorisation des eaux de pluie, notre famille peut faire jusqu’à 40m³ d’économie. Elle continuera de consommer 100m³ d’eau au total qui seront répartis en 60 m³ d’eau potable et 40m³ d’eau de pluie. C’est là que le bât blesse. Si cette famille a bien réduit sa consommation d’eau, le volume d’eaux usées reste identique, soit 100m³.

La facturation étant basé sur le seul compteur positionné en entrée de la maison, le montant de la taxe d’assainissement sera de 60m³ × 3€ (pour 100 m³ rejeté). C’est pour cette raison que le législateur indique dans l’article 3- point VIII de l’arrêté du 12 juillet que » tout système d’utilisation d’eaux impropres à la consommation humaine comporte un système d’évaluation du volume utilisé par les usagers ».

Ce rappel nous ramène au code général des collectivités qui stipule dans l’article R 2224-19-4 que « Toute personne tenue de se raccorder au réseau d’assainissement et qui s’alimente en eau, totalement ou partiellement, à une source qui ne relève pas d’un Service Public doit en faire la déclaration à la mairie ».


Alors impôt ou pas impôt ?

La législation sur l’eau de pluie ne mentionne jamais le principe d’un impôt, mais bien le paiement de la taxe d’assainissement. Il est important de préciser que les volumes d’eau de pluie utilisés à déclarer sont uniquement les volumes rejetés à l’assainissement. Concernant les eaux de pluie utilisées pour arroser votre jardin, aucune taxe sur ces volumes ne peut vous être réclamée.

Si vous êtes en assainissement individuel, aucune taxe ne peut vous être exigée quelque soit vos usages.

Le second point sur lequel je souhaite mettre l’accent est que si en tant qu’utilisateur d’eau de pluie, vous devez déclarer votre installation en mairie et mettre en place un dispositif de comptage, c’est à la structure en charge de l’assainissement de venir collecter ces données pour établir la facture adéquate mais :

  • En a t’elle les moyens humains et matériels ? Cela reste à voir.
  • Et si j’étais poil à gratter, je demanderais à cette commune tatillonne si elle offre – en contrepartie – la possibilité à l’ensemble de ses administrés de déduire de la taxe d’assainissement sur les volumes d’eau potable consommés, mais non rejetés dans le réseau d’assainissement. Je pense à tous ceux qui arrosent leur jardin à l’eau potable par exemple.

Schéma d’une installation de récupération des eaux de pluie

Schéma « comptage d’une installation de récupération des eaux de pluie » — issu de notre support de formation.


Mon point de vue
sur cet article

Discutons de votre projet

Cela fait plus de 20 ans que je préconise la mise en place d’unités de valorisation d’eau de pluie, alors, je ne vais pas critiquer les bonnes volontés qui investissent dans des solutions récupération d’eau de pluie, au contraire.

Cependant, je prône pour une professionnalisation de cette démarche. Les motivations à la valorisation de cette ressource ne sont plus seulement liées à une envie de bien faire, mais à une nécessité de faire face à une raréfaction de la ressource.

C’est pour cela que comme pour l’énergie, il est nécessaire d’avoir une démarche rationnelle pour que nos dossiers soient acceptables économiquement et écologiquement. Le concept du « qui peut le plus peut le moins » associé à « la peur de manquer » entraîne de nombreux surdimensionnements qui ont pour conséquence des maîtres d’ouvrage insatisfaits – retour sur investissement inexistant, dégradation de la qualité de l’eau.

C’est pour cette raison que je ne peux qu’inciter les donneurs d’ordre à être exigents concernant les attendus d’une étude de dimensionnement et à travailler avec des bureaux d’étude indépendants de toute action de vente.